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jeudi 24 novembre 2022

Article de LandLiebe décembre 2022 (traduction)







 

Une danse virtuose avec une lame fine

Les papiers découpés en filigrane de Réhane Favereau fascinent par leur richesse en détails et précision. L'artiste genevoise a réalisé la couverture de ce LandLiebe et nous plonge ainsi dans une ambiance de Noël.

Texte de Corinne Schlatter
Photos de Nicolas Righetti

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ARTISTE RURAL

Réhane Favereau pose avec précision la lame de son scalpel spécial sur le papier, la fait glisser au millimètre près le long de fins traits de crayon. Aussitôt, elle lève brièvement son œuvre vers la lumière et regarde à quels endroits elle doit encore couper. "Il est important d'enlever immédiatement les morceaux de papier découpés, aussi petits soient-ils. Sinon, on perd la vue d'ensemble", dit-elle.
Travailler les fines ramifications d'un arbre dénudé en hiver est un défi. Réhane Favereau doit faire preuve d'imagination et de courage pour couper toujours au bon endroit.
Comme une chirurgienne lors d'une opération, Réhane Favereau travaille sur les détails.

Réhane Favereau, 66 ans, de Chambésy près de Genève, est une artiste du papier découpé. Cette appellation n'est pas tout à fait correcte, car ce ne sont pas des ciseaux qui lui servent d'instrument de travail, mais un cutter - un cutter à papier qui, dans son cas, vient du Japon.

Les œuvres d'art en filigrane de cette femme créative n'ont pas grand-chose à voir avec les découpages que nous faisions nous-mêmes, enfants, en découpant de petits motifs dans du papier plié plusieurs fois. Les papiers découpés de Réhane Favereaud racontent de charmantes histoires, montrent des scènes - voire des univers entiers - avec une finesse, une précision et une fidélité aux détails impressionnante. Les motifs sont tantôt traditionnels, ruraux, alpins, avec des vaches, des alpages, des chalets, des fleurs, des enfants, tantôt modernes, urbains, avec un regard esthétique sur des bâtiments, des réalisations techniques ou des arbres de parc.

L'art du papier découpé est originaire du nord de la Chine et de la Perse et est attesté depuis le quatrième siècle. Au 17e siècle, la technique est arrivée en Europe, y compris en Suisse, 
où les silhouettes étaient d'abord utilisées comme images de dévotion et portraits de silhouettes. Johann Jakob Hauswirth (1809-1871) est considéré comme le père du papier découpé traditionnel suisse. Ce journalier et travailleur itinérant a créé des scènes alpines d'une beauté touchante et a évoqué la vie simple dans les montagnes avec son motif le plus connu, la montée à l'alpage.
L'artisanat du papier découpé s'est ensuite largement répandu dans notre pays et est toujours entretenu au plus haut niveau.

Outre l'Oberland bernois, les centres sont surtout l'Appenzell et le Pays d'Enhaut vaudois autour de Château-d'Oex.
Après une certaine baisse de popularité au cours des dernières décennies, il existe encore aujourd'hui deux ou trois cents artistes du papier découpé qui travaillent avec des ciseaux ou des cutters et qui présentent parfois leurs œuvres dans des expositions. Outre les sujets alpins et les thèmes d'un monde rural et serein toujours très appréciés, nombre d'entre eux essayent de sortir du cadre traditionnel des éditions en papier découpé. Ils surprennent parfois par des formes abstraites, reprennent en outre des thèmes sociaux, quotidiens ou politiques actuels et les abordent tantôt avec humour, tantôt de manière critique. 

Ils jouent avec les couleurs, les matériaux, les perspectives, la tridimensionnalité et la plasticité et marquent leurs œuvres de leur empreinte.
Réhane Favereau est l'une de ces artistes contemporaines du papier découpé, toujours à la recherche de nouvelles formes d'expression. Encouragée et soutenue par son mari Daniel, qui l'aide à transporter des matériaux lourds ou à installer des montages techniques, elle expérimente également depuis quelques années le découpage au plasma et le métal. Elle crée ainsi des sculptures impressionnantes et des installations lumineuses artistiques, mais aussi des rampes d'escalier et des décorations murales en fer avec des motifs classiques de découpage.

L'artiste considère le travail du métal comme un complément. Le cœur de son travail créatif reste toutefois l'art du papier découpé, qu'elle ne cesse de perfectionner. Les nombreuses invitations à des expositions renommées en Suisse et à l'étranger, notamment au Japon, où le papier découpé est une forme d'art très respectée, prouvent qu'elle fait partie du peloton de tête dans ce domaine.

La Romande, dont les grands-parents, tant du côté maternel que paternel, étaient agriculteurs et lui ont transmis l'amour de la terre et des traditions, s'est en outre fait un nom ces dernières années avec des travaux de commande prestigieux : en particulier avec sa "Spirale" ludique, avec des histoires tendres et des protagonistes en costumes magnifiques, qui ont défilé sur les écrans géants de la Fête des Vignerons 2019 à Vevey VD pendant le gigantesque spectacle sous forme d'images animées projetées, accompagnant l'action réelle dans l'arène. En 2015, cette mère de deux filles adultes a en outre pu concevoir une monnaie commémorative sur le thème des coutumes suisses pour la Monnaie fédérale Swissmint et a réalisé pour cela une transposition artistique du thème de la désalpe.

Ces dernières années, plusieurs de ses papiers découpés étaient également disponibles sous forme de cartes Unicef, que le Fonds des Nations Unies pour l'enfance publie avant Noël. C'est une carte de l'Unicef de ce type qui a donné à l'équipe de rédaction de LandLiebe l'idée de confier à Réhane Favereau la réalisation de la couverture de l'édition magique des fêtes.

La vue d'un village hivernal qu'elle a créée ces dernières semaines, où petits et grands s'ébattent dans la neige, décorent le sapin de Noël ou se préparent à la fête dans la chaleur du salon, apaise la nostalgie d'un Noël blanc. 

L'artiste développe ses histoires dans son imagination et dessine les décors, les parties de paysage, les personnages, les sujets et les ornements au crayon sur le verso blanc d'un papier spécial noir ou parfois multicolore, avant de commencer à découper.

 "Il faut de l'imagination, car il faut faire des croquis inversés", explique-t-elle, ajoutant que cela est surtout décisif pour les paysages et les événements réels.

Il lui faut plusieurs heures pour réaliser un projet. Il est important, dès cette première étape, de définir les silhouettes, les contours et les découpes comme un tout cohérent. "Si l'on coupe un support, des scènes entières peuvent disparaître de l'image".

La créativité dans le sang

Les œuvres de la Genevoise, découpées avec une minutie inouïe, ont un charme particulier grâce à leurs contrastes marqués et à leur finesse, et semblent un peu sorties de ce monde. On se demande comment Réhane Favereau fait et on s'étonne quand l'artiste raconte qu'elle a appris son métier en autodidacte.

"J'ai toujours été créative, j'ai beaucoup bricolé, cousu, tricoté, peint", explique cette professeur des écoles qui exerçait son métier jusqu'à il y a quatorze ans. C'est lors d'une visite au musée gruérien de Bulle en 1992, qu'elle a eu son premier contact avec l'art du papier découpé et qu'elle a acheté un papier découpé. Cinq ans plus tard, elle a commencé à essayer la technique elle-même. Elle a rapidement développé une dextérité et une créativité hors du commun et a acquis un grand savoir-faire. "J'ai encore beaucoup d'idées", admet-elle - heureusement, on ne peut que l’approuver.


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